Après l’expo Pourrir dans un monde libre au MO.CO Panacée et l’expo-hommage à F.J Temple à l’espace Dominique Bagouet, on t’emmène voir « Communes » au Pavillon Populaire. Considéré comme l’un des meilleurs photographes de son temps, Raymond Depardon y donne à voir les communes de l’arrière pays qui ont échappé au « Permis de Nant ». Tout simplement splendide.
Le Pavillon pop’, repère des amoureux de la photo
En bonne amatrice de photo, je loupe rarement une expo du Pavillon Populaire. Car comme je te le disais dans l’article 5 galeries d’art gratuites où t’en mettre plein la vue à Montpellier, le Pavillon Populaire est le repère des amoureux de la photographie.
Niché sur l’Esplanade de la Comédie, le Pav’Pop’ comme je l’appelle affectueusement est en effet entièrement dédié à l’art de la photographie.
On y accueille des artistes d’envergure nationale ou internationale le plus souvent. C’est aussi là que s’installent les Boutographies, le festival qui met en lumière les jeunes talents de la photographie européenne et qui a généralement lieu au mois de mai – bientôt donc !
Après l’expo aquatique d’Andréas Muller Pohle en janvier, il fallait forcément que j’aille jeter un œil à l’expo-évènement du moment, à savoir « Communes » de Raymond Depardon. Mais commençons à présenter un peu le bonhomme.
Raymond Depardon, un grand nom de la photographie française
C’est pas un hasard si la presse a autant parlé de cette expo, alors qu’on est plutôt gâtés niveau culture en ce moment. Monsieur Depardon, Raymond de son prénom, le gars à qui on doit les clichés, c’est pas n’importe qui tu sais.
Photographe, réalisateur, journaliste, scénariste, Raymond Depardon est tout ça à la fois. Quel parcours incroyable il a eu ! Le bougre a sillonné le monde, couvert mille sujets, fondé la mythique agence Gamma, raflé je ne sais combien de prix … ? Plus d’infos sur la vie de Raymond Depardon
Il est aujourd’hui considéré comme l’un des des maîtres du film documentaire et de la photographie contemporaine, après 60 ans de carrière. D’ailleurs, c’est lui qui a fait le portrait officiel de François Hollande !
En somme c’est un homme qui aime raconter, aussi bien avec les mots qu’avec les images. Et qui est très doué pour ça.
Des photographies exclusives tirées d’un livre
Les photos que tu peux voir en ce moment au Pavillon Populaire ont fait l’objet d’un livre, qui s’intitule sans surprise « Communes ». Né à l’été 2020, soit au lendemain du premier confinement, Communes est un essai photographique sur les villages de l’arrière-pays méditerranéen.
L’artiste s’est plus exactement concentré sur le sud du Massif Central, dans les départements de l’Aveyron, de la Lozère, du Gard et de l’Hérault, dont il a tiré 80 clichés. Pourquoi à cet endroit là, particulièrement ?
Parce que cette zone a réchappé à un projet qui aurait pu être une vraie catastrophe écologique : le permis de Nant.
Une zone rurale fragile qui a réchappé au Permis de Nant
Les villages immortalisés par l’artiste sont ainsi tous situés sur une zone géographique particulière : celle concernée par le Permis de Nant.
Mais tu as peut être déjà entendu parler de ce projet, qui a vu le jour en 2010 sous la présidence de Nicolas Sarkozy ? Le Permis de Nant désigne un permis de recherche de ressources minières accordé à une société texane. En gros, l’idée est de fouiller le sol à la recherche de gaz de schistes. Ça concerne quand même 280 communes, et plus d’un demi million d’habitants !
Heureusement en 2011, le projet tombe à l’eau grâce à une fronde et une mobilisation citoyenne menées par des mouvements écologistes et politiques de gauche. Il faut dire que le territoire concerné est fragile et qu’on connaît la brutalité des extractions du gaz de schistes et leurs retombées néfastes sur l’environnement…
Retour sur l’expo de Raymond Depardon
Maintenant que tu sais un peu mieux de quoi il retourne, concentrons nous sur l’expo.
Je prends bien soin d’étudier le petit livret d’exposition fourni par le pavillon populaire avant d’aller admirer les clichés. Ce qui est chouette, si tu ne veux pas gaspiller de papier, c’est qu’il existe aussi en version numérique.
Et j’ai bien fait de le consulter ce livret puisque j’y découvre des éléments importants pour la compréhension de l’expo. Notamment qu’elle se concentre sur les 280 communes qui auraient du être impactées par le permis de Nant, ce en quoi ce permis consiste, et comment il a capoté. #mercilesécolos
Me reviennent en mémoire les propos furibonds de ma tata écolo qui vit dans un petit village de l’arrière pays pas loin d’ici, et fustigeait contre « ces connards de capitalistes qui détruisent l’environnement ».
Bien renseignée, j’attaque donc l’expo !
Plusieurs salles
Ceux qui sont déjà allés au Pavillon Populaire le savent : il y a là plusieurs espaces d’exposition, organisés en couloirs autour d’une grande salle centrale. Parfois, elle s’étend jusqu’au deuxième étage mais ce n’est pas le cas ici.
La première partie de l’expo est composée de photographies en couleur comme en noir et blanc, et aussi de matériel photographique. La seconde, la salle principale, révèle une série de clichés autour des villages, tous en noir et blanc.
Enfin la dernière partie se concentre davantage sur l’auteur lui même. Tu peux y voir entres autres un documentaire sur Raymond Depardon ainsi que des ouvrages du célèbre photographe. Allez hop, c’est parti !
Petit aperçu en images
Je commence donc par la première partie. On voit direct que ces photos ont été prises dans le Sud. Enfant du pays, je reconnais mon chez moi dans ces tuiles rousses mangées par le soleil et ces grands platanes sur les places principales des villages.
Presque tout de suite, je suis touchée. Touchée parce que je trouve que le noir et blanc a une élégance folle mais aussi par les scènes de vie quotidienne immortalisées ici. 4 petites vieilles souriantes sur un banc en pierre. Une maman qui tient son petit enfant près d’une fontaine en vieilles pierres. Le regard de l’artiste est plein d’humanité…
Puis loin je tombe en pamoison devant un vieil appareil photo – je te l’ai dit, je suis amatrice de photo, c’est de famille !
Encore plus loin je m’espante en reconnaissant le Macarana, le bar de la place de Bédarieux où j’ai fait mon lycée. Je sens que cette expo va être top et je souris bêtement toute seule.
Me voici dans la salle principale. Très judicieux le choix de cet orange vif et de ce jaune chatoyant en guise d’arrière plan, ça créé un bel effet de contraste. Dans cette salle ci il n’y a que des clichés de villages en noir et blanc.
Places de villages, rues sinueuses, escaliers tarabiscotés, portes d’églises, d’école… Autant d’éléments du quotidien quoi. Bien qu’elles soient en noir et blanc, elles me semblent très lumineuses ces photos.
Et là encore, ça me touche. Pourtant il n’y a presque pas d’êtres humains dans cette section là. Est ce que parce que ces décors me sont familiers ?
Je te l’ai dit, je suis enfant du pays. En conséquence, j’ai de la famille et des amis un peu partout autour de Montpellier. Et je connais presque chacun des villages exposés ici. Mourèze, Saint Hippolyte du Fort, Gigean, Villeveyrac … y’a même celui où ma mère habite ! C’est fou !
Me voilà enfin à la dernière partie de l’expo. Le documentaire qui présente l’artiste me fait halluciner. Quel homme, quelle histoire, quel engagement ! Je comprends mieux pourquoi on parlait de Communes comme d’une expo absolument incontournable …
La quantité de livres et d’écrits dont il est l’auteur ou qui le concernent ne fait que confirmer l’ampleur du personnage. Je ne regrette absolument pas d’être allé voir cette expo. Et m’intéresse désormais de plus près à ce cher monsieur Depardon.
Verdict
Eh bien, eh bien.
Communes est un vrai petit bijou. Une ode à la ruralité, à la simplicité aussi, et au quotidien. Du moins c’est mon avis. Qu’ils soient en couleur ou en noir et blancs, les clichés sont touchants et profonds – et même c’est on est pas d’ici je pense. Quand on aime la photo, quand on connaît l’ampleur de ce personnage, vraiment on ne peut pas rater ça !
Voici pour finir mes 5 bonnes raisons d’y aller.
1 – C’est une occasion inespérée de découvrir le travail d’un homme considéré comme l’un des meilleurs photographes de son temps. Tout de même !
2 – Son travail est touchant et vient titiller la corde sensible. Tu le verras par toi même.
3 – Que tu sois d’ici ou pas, ça t’offre un très bel aperçu de la vie des villages d’ici.
4 – Comme toutes les expos du Pavillon Populaire, l’expo est gratuite.
5 – Elle se termine bientôt, le 24 avril !
« Communes » de Raymond Depardon
? Pavillon Populaire, Esplanade Charles de Gaulle (Ecusson)
? Lignes 1 et 2 arrêt Comédie
⏳ Jusqu’au 24 avril 2022
? Ouvert de 10h à 13h et de 14h à 18h du mardi au dimanche (sauf 25 décembre et 1er janvier)
? Plus d’infos sur l’expo
